Le Père Arthur BAUR
Il est né le 22 mai 1913, à Durlinsdorf, dans la famille d'Albert Baur et de Rose Froehly: "au début de la guerre de 1914, le village entier est déporté en Allemagne, à Osterburgen; mon père est tué aux champs en septembre 1915; nous sommes trois enfants et ma mère; nous revenons au pays à l'Armistice; des amis nous aideront à survivre: on cultive un lopin de terre, on travaille dur" écrit Arthur Baur. Les trois enfants seront adoptés par Auguste Baur (le frère d'Albert).
A l'occasion d'une retraite dans le village, des pères jésuites proposent au jeune Arthur de devenir missionnaire, ce qu'il accepte aussitôt; il quitte alors l'Alsace pour Florennes en Belgique: on est en avril 1925, il a douze ans; il ne rentrera "à la maison" qu'une fois par an.
Après des études secondaires, il se présente au noviciat des jésuites en Belgique et fait ses premiers voeux en 1932; parallèlement il étudie le grec et le latin.
A 21 ans, la congrégation des Jésuites l'envoie en Chine comme professeur de latin: en septembre 1934, avec trente autres missionnaires, il embarque à Marseille.
A son arrivée en Chine, il trouve une église bien structurée, forte de cent vingt diocèses et de plus de trois millions de fidèles.
Il apprend le chinois, la philosophie puis la théologie et prépare la prêtrise: il est ordonné le 7 juin 1944: à cette époque, les Jésuites avaient neuf missions et plus d'un millier de prêtres dispersés dans toute la Chine.
Après son ordination, il est envoyé dans le nord du pays, en proie à la guérilla communiste; la mission de Sienhsien n'échappe pas à l'arbitraire populaire et, alors que plusieurs missionnaires aient été emprisonnés et soumis à un lavage de cerveau, l'ensemble de la mission est finalement reconduit à la frontière:"nous laissions derrière nous des ruines, des maisons dévastées, des églises incendiées, on abandonnait nos chrétiens si généreux à leur triste sort...": il fut libéré le 31 juillet 1948.
Il était attendu avec impatience à Durlinsdorf, où l'on avait entendu parler de sa condamnation à mort: tout le village était là pour l'accueillir et assister à sa première messe au pays: "La chorale du curé Spinhirny a fait merveille. J'étais le roi du village" (le 26 septembre 1948).
Après quelques mois consacrés au repos et à la prière, il reçut l'ordre, en juillet 1949, de rejoindre les Philippines pour recevoir les jeunes jésuites expulsés de Chine; après six années orientées vers l'enseignement, il est nommé curé des chinois, à Cébu, grosse ville du centre des Philippines, avec pour objectif de bâtir l'église du Sacré-Coeur: c'est à cette mission qu'il se consacra pendant vingt ans, faisant de son église et du collège attenant (plus de l500 élèves) la fierté de la communauté chinoise.
Alors qu'il pensait passer sa vie avec ses amis chinois, un "nouveau coup du sort" l'oblige à quitter Cébu pour Iloilo début 1977.
Après un accident de santé, il y vit retiré, célébrant la messe chaque jour dans sa chambre, écoutant des confessions.
A l'occasion d'un interview, à la question: "Succès ou échec ?":"Humainement c'est un échec; j'ai bien appris le chinois en quinze ans, mais en 1946, quand j'étais prêt à commencer mon apostolat en Chine, les communistes sont venus détruire notre oeuvre; mais après la passion, il y a la résurrection: les chinois d'outre-mer ont profité de la révolution du continent, les missionnaires travaillent pour eux".
Aujourd'hui âgé de 88 ans, il se sent chez lui en Extrême-Orient et n'envisage plus de rentrer au pays: "Je m'y sentirai inculturé!".
"Je ne regrette rien de ma vie : en 1934, le Seigneur m'a dit : "Suis moi... Celui qui met la main à la charrue et se retourne pour regarder en arrière n'est pas digne de moi".
Article de M. Jacques-Henry BAUER